L’arrière-pays niçois : 3 saisons en 4 jours

Nous étions partis dans l’espoir de trouver du soleil sur la Promenade des Anglais et il nous accueillit, mais un peu plus loin, un peu plus haut. Après la joie des retrouvailles gare d’Austerlitz avec Estelle (G. O.), Antoine (ouvreur de voies), Maria (ambiance caliente), Benoît (support technique) et Peter (paparazzo), après l’excitation du départ (toujours un parfum d’aventure), enfin, après une nuit de train, nous regardons médusés la Méditerranée qui prend l’eau. Il pleut sur Nice ! Après un rapide petit déjeuner, nous filons sous nos ponchos colorés en quête de sommets, de lumière. Et c’est parti pour quatre jours de randonnée haute en couleur pleine de surprises et de dénivelés.


 Ce samedi 8 novembre 2003, nous devons rallier Sospel, à 70 km de Nice, par un tracé que nous a concocté Estelle assistée d’ Antoine et Benoît, fins connaisseurs de la région. La sortie de Nice pour rejoindre la Grande Corniche est un peu douloureuse, le groupe explose, mais qu’importe, chacun roule à son rythme. La vue sur Saint- Jean -Cap-Ferrat est saisissante avec ce ciel tourmenté, la végétation d’un vert sombre cernée par une palette de gris très riche : les pupilles commencent à s’exciter, les sens s’éveillent. A la Turbie, nous prenons la direction du nord et commençons à nous enfoncer dans la montagne. Juste avant Peille, le meilleur moment de la journée s’offre à nous : le pique-nique. Tranquilles, pas un chat, juste un chien, nous profitons d’une vue magnifique sur les sommets de la région (mont Férion, Cime de Rocaillon, mont Tournairet) dont certains sont enneigés. Roulerons-nous dans la neige ? Le désir prend naissance… Cette pause est l’occasion une fois de plus de pratiquer un troc endiablé : échange tranches de saucisson aux herbes contre un morceau de morbier et trois olives… Dans l’ascension du col des Banquettes (741m) nous rencontrons les premières couleurs automnales (je vous laisse imaginer, parce que sur un tirage noir et blanc forcément ça ne passe pas bien !), et en arrière-plan des couleurs fauves, des sommets enneigés toujours plus proches. Le contraste est fascinant. Maria a quelques soucis mécaniques, et Benoît se lance dans la bataille : réglage de freins et dérailleurs. Trente à quarante minutes plus tard, nous revoilà partis pour une descente avant de prendre d’assaut le col de Segra (963 m), puis celui de Braus (1002 m), tous deux par une voie non carrossable. A partir de Segra, sur 20 kilomètres, nous évoluons dans un paysage touché par la neige (et la grâce) : moment magique au col de Braus avec un soleil qui entame sa descente. Le temps de nous couvrir, et nous entamons une descente de 650 m pour rejoindre Sospel dans la nuit et le froid.

Dimanche matin, le soleil se montre généreux et ne nous quitte pas de la journée. Après 1 600 m de dénivelé la veille, nous nous attaquons aujourd’hui au col de Turini perché à 1607 m (1 300 m de dénivelés). Notre route longe les gorges du Piaon où coule la Bévéra. Jusqu’à 800 m, les versants très à pic sont tachetés de couleurs or, rouille, prune, safran, moutarde, vert tendre, bleu-vert, vert sombre (imaginez encore…). A l’arrivée, l’ambiance est (comment dire) très différente : tout est blanc ! Avec Antoine , Benoît et Jean – Michel (qui nous a rejoints la veille en voisin niçois), nous improvisons un pique-nique sous un abri puis prenons place autour de tasses de café dans le restaurant le plus proche. Au même moment, Estelle, Maria et Peter mangent quelques lacets plus bas. Le groupe se reconstitue vers 15 heures pour rejoindre notre hôtel. Une heure plus tard, les plus courageux s’équipent pour aller plus haut, toujours plus haut, en direction de l’Authion. A 1 800 m, c’est encore plus beau. Les arbres sont de flamboyantes sculptures rouillées sur les flancs blancs et l’horizon est ébréché par les chaînes de montagnes parées de parme et de gris. Avant et après la beauté de ce tableau, c’est une tout autre histoire car la route n’est pas déneigée : hésitations, tensions, patinage, dérapages mais pas de chute.

 

Le troisième jour permet aux organismes de récupérer avec 1 300 m de dénivelé négatif pour rejoindre Saint- Jean -la-Rivière au pied d’Utelle (346 m) traversé par la Vésubie. Les premiers kilomètres sont très rafraîchissants (!) et dans un décor tellement beau, saupoudré de cette neige que nous allons bientôt quitter. Au col de Saint-Roch, après 15 kilomètres, tout le monde s’épluche : il fait franchement meilleur, et je poursuis d’ailleurs torse nu : trois saisons en 25 kilomètres, c’est pour le moins inattendu.

La petite difficulté de la journée nous attend pour la fin avec l’ascension vers Utelle, village très mignon perché à 935 m. Nous croisons de nombreux oliviers dans les premiers lacets, encore chargés de tous leurs fruits. Arrivés en fin d’après-midi, cela nous laisse le temps de faire l’acquisition des produits nécessaires à la réalisation d’une tartiflette gargantuesque et de manger tôt. La vaisselle est expédiée à très grande vitesse, car suite à un cafouillage administratif, nous voici obligés de changer de gîte. Se pose ensuite le problème de qui dort avec qui, car nous avons troqué un dortoir contre trois chambres avec notamment deux lits doubles. Nous laissons le sort décider de la répartition à l’occasion d’un tirage animé par votre serviteur. Le résultat… vous ne le connaîtrez pas (ce n’est pas « Loft Story » !).

Les premières heures du mardi nous offrent encore des vues superbes sous le soleil. Mais au fur et à mesure que nous nous rapprochons de la Méditerranée, le ciel se voile et le temps se refroidit. Nous passons par Levens (520 m), Aspremont (499 m) et Falicon (261 m) avant de descendre sur Nice, direction la Promenade des Anglais, la Méditerranée, très pâle. Malgré un temps plutôt frisquet, je pique une tête en cuissard sous les objectifs de deux paparazzi, Estelle et Peter. Un aller-retour sur la Promenade des Anglais, une dégustation de socca (galette de pois chiches à l’huile d’olive) et une promenade dans le vieux Nice finissent de nous ouvrir l’appétit.

Après dîner, nous filons prendre notre train pour une nouvelle nuit couchette. A bientôt, Nice, tes montagnes et tes routes qui nous ont fait rêver éveillés. Tous les six, nous nous sommes nourris de quatre jours de bonheur, bonne humeur et chaudes couleurs, rigolades, chansons. Et surtout, nous avons touché du doigt les sommets de la beauté entre Ciel et Terre.

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